Hommage à Henri Maillot MORT POUR L'INDEPENDANCE DE L'ALGERIE

19/02/2016 11:37
Hommage à Henri Maillot
MORT POUR L'INDEPENDANCE DE L'ALGERIE
 
Henri Maillot (Alger le 11 janvier 1928, Lamartine, aujourd'hui El Karimia, le 5 juin 1956) est un militant communiste anticolonialiste français.
Né dans une famille Pied-Noir, ami depuis l'enfance de Fernand Iveton, son voisin du Clos-Salembier, Henri Maillot fut un militant du Parti communiste algérien (PCA). Secrétaire général de l'Union de la Jeunesse Démocratique algérienne, il représenta l'Algérie dans des congrès de la jeunesse à Prague et à Varsovie. Il fut aussi employé par le quotidien Alger Républicain, proche des communistes. La répression qui frappe les musulmans après le massacre du Constantinois (département de Constantine) d'août 1955, marque profondément Henri Maillot, qui va alors confirmer ses choix politiques et se joindre aux Algériens engagés dans la lutte pour l'indépendance.
Le 22 mai 1956 Henri Maillot est condamné à mort par contumace pour trahison par le tribunal militaire d'Alger. Le 5 juin 1956, le groupe de huit maquisards du « maquis rouge » que commande Henri Maillot est surpris par les troupes françaises près de Lamartine (aujourd'hui El Karimia) dans la région d'Orléansville (aujourd'hui Chlef). Trois membres du groupe sont tués au combat : Belkacem, Hammi et un Européen, Maurice Laban, membre du Parti communiste algérien, ancien combattant de la guerre d'Espagne et ancien Résistant. Henri Maillot, quant à lui, est pris vivant puis confié aux gendarmes mobiles. Après deux heures de tortures on lui dit de filer. Il part à reculons en criant « Vive le Parti communiste algérien ! » et s'écroule sous une rafale.
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Henri Maillot et Maurice Laban, héros « oubliés »
El Watan, 18 juin 2007
Le devoir de mémoire nous impose de connaître notre histoire pour mieux comprendre le présent et appréhender l’avenir. Il revêt aussi une importance particulière pour l’écriture de l’histoire de la guerre de Libération nationale.
Celle-ci demeure d’une actualité brûlante. Elle procède, malheureusement, des luttes politico-idéologiques actuelles dont elle reste un enjeu important. Pour ce faire, nous devons ressusciter certains héros « oubliés », et, parmi eux, l’aspirant Henri Maillot et Maurice Laban, authentiques patriotes algériens, morts les armes à la main un certain 5 juin 1956. Comme Yveton, son voisin et ami d’enfance, héros guillotiné le 11 février 1957, Maillot avait choisi la cause de l’indépendance de l’Algérie par conviction idéologique, considérant la guerre de libération comme « une lutte d’opprimés sans distinction d’origine contre leurs oppresseurs et leurs valets sans distinction de race » tel qu’il l’a écrit lui-même aux rédactions parisiennes juste après sa désertion. Ayant assisté à la répression qui s’est abattue sur les musulmans lors des événements du 20 août 1955 dans le Nord constantinois, il en est sorti profondément marqué. Il a, dès lors, pris résolument la décision de se joindre au combat libérateur. Après avoir été rappelé sous les drapeaux pendant 3 mois, il demanda à être réengagé, dans le but de mettre à exécution son projet de désertion avec un stock d’armes. Affecté au 57e bataillon de tirailleurs de Miliana où il a le grade d’aspirant, Maillot convoite l’occasion de détourner des armes pour les acheminer aux maquis de la résistance algérienne afin, précise-t-il, d’« aider mon pays et mon peuple », (lire la lettre). L’opportunité se présente le 4 avril 1956 : l’officier Maillot déserta avec un camion d’armes qu’il remet aux moudjahidine. Pas moins de 132 mitraillettes, 140 revolvers, 57 fusils et un lot de grenades viennent enrichir le potentiel militaire de la résistance. Henri Maillot, devenu « l’officier félon » pour la presse coloniale, est condamné à mort le 22 mai par le tribunal militaire d’Alger, qui décide de mettre aussi le maison familiale de Clos-Salembier sous séquestre, et ce, afin de faire rembourser les armes sur la part d’héritage revenant à Henri. Activement recherché, il échappe aux paras jusqu’au mardi 5 juin 1956, quand son commando de 8 hommes fut surpris au djebel Deragua, à El Karimia (Lamartine), par les miliciens du bachagha Boualem et les soldats français. Henri y laissera sa vie, ainsi que quatre autres compagnons d’armes : l’enseignant de Biskra, Maurice Laban, Belkacem Hamoun qui n’avait pas 20 ans, Djillali Moussaoui et Abdelkader Zalmaï. Trois combattants ont échappé au traquenard : Hamid Guerab, Mohamed Boualem et Mustapha Saâdoun. Mustapha Saâdoun est le dernier survivant de cette aventure inoubliable. Il a 89 ans. Retiré à Cherchell, il vit désormais avec ses plantes et ses souvenirs. Force est de constater que cinquante et un ans après sa mort, Henri Maillot reste inconnu de la grande majorité de la génération postindépendance, qui, plus est, par les jeunes d’El Madania, quartier où vit toujours sa famille. Et pour cause, aucune rue, ni école, ni institution publique ne porte son nom jusqu’à l’heure actuelle. La désertion de cet officier avec un camion rempli d’armes vers le maquis a été d’une grande portée psychologique et a marqué de façon éclatante la participation d’Algériens d’origine européenne au combat pour la libération de la patrie commune. Un combat qui n’avait aucun caractère de race, ni de religion, mais un combat libérateur et national. Quant au second, Maurice Laban, né à Biskra de parents instituteurs, il était lui et sa sœur les seuls Européens dans toute l’école où enseignaient leurs parents. C’est tout naturellement qu’il a appris à parler l’arabe comme une langue maternelle. Plus tard, il parlera le chaoui couramment après avoir enseigné dans une école indigène où les élèves ne parlaient que cette langue. Dans les années 1930, il prit part à la guerre civile d’Espagne aux côtés des républicains, il fut blessé deux fois sur le front. La deuxième blessure était tellement grave qu’il a failli être achevé par les brancardiers qui ne croyaient pas en sa survie. C’est finalement Georges Raffini, son camarades de lycée à Constantine, qui le sauvera in extremis sur le champ de bataille. Il était tellement imprégné de la mentalité de la population de Biskra qu’il envoya une lettre à ses parents leur demandant de sacrifier un mouton sur le tombeau de Sidi Messaoud (le saint patron de la localité) et de l’offrir accompagné de couscous aux pauvres de la région. Et ce, en guise de reconnaissance envers Dieu pour l’avoir sauvé d’une mort certaine. De retour d’Espagne, il rentrera à Biskra où il participera, aux côtés des musulmans opprimés, à tous les combats contre les formes d’injustice auxquelles ils étaient soumis par le système colonialiste et leur valet, le bachagha Bengana. En 1941, il fut arrêté et incarcéré à Serkadji, puis condamné à mort avec son épouse Odette et son camarade Georges Raffini. L’acte d’accusation portait sur la publication et la diffusion d’un journal clandestin s’opposant au régime fasciste de Pétain. Au déclenchement de la révolution, le chahid Mostefa Benboulaïd fait appel à lui pour devenir son adjoint. Vu son tempérament de bagarreur, Maurice était ravi à l’idée de s’engager, enfin, dans la lutte armée contre le colonialisme. Etant un militant discipliné du parti, il demanda l’accord de sa hiérarchie. Celle-ci refusa et lui demanda de tempérer ses ardeurs jusqu’à nouvel ordre. C’est, finalement, à El Karimia (Lamartine), dans l’Ouarsenis, qu’il devra rejoindre Henri Maillot qui venait de déserter. Cette rencontre fut possible grâce à Myriam Bey, militante du parti et enseignante à Oued Fodda. La méconnaissance de cette région leur fut fatale, à lui et à ses compagnons.
L’auteur est Ingénieur, cadre supérieur
Merzak Chertouk
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Enfin ! : Une bonne reconnaissance
Une plaque de baptisation d’une place au nom du chahid Henri Maillot a été dévoilée hier à la commune d’El Mouradia, à Alger, par le président de l’Assemblée populaire communale (APC), Mourad Sameur, en présence de sa sœur, Yvette et de ses compagnons ainsi que de nombreux citoyens.
Les présents à cette cérémonie organisée à l’occasion de la commémoration la journée nationale du chahid se sont ensuite rendus au cimetière chrétien dans la même commune pour se recueillir à la mémoire du chahid, tombé au champ d’honneur en 1958. Sa sœur, 88 ans, s’est déclarée très fière de la reconnaissance «du sacrifice de son frère pour son pays».
Les présents ont souligné que cette reconnaissance est un couronnement des efforts des moudjahidine afin que nul n’oublie «l’acte héroïque» de Maillot, mort sous les balles de l’armée française le 5 juin 1956. Son compagnon, Félix Colozzi, qui a travaillé à ses côtés au quotidien Alger Républicain, a indiqué que Maillot a eu le courage de former des militants de la cause nationale avant d’être tué par l’armée française. Jeune aspirant de l’armée française, Maillot a décidé de détourner un camion chargé d’armes au profit de la Révolution avant de rejoindre les rangs de l’ALN.
El Watan du 19 /02/2016
APS