LES COURANTS MIGRATOIRES VERS L'EUROPE

03/04/2015 06:25
JEAN-CLAUDE CHESNAIS 
LES COURANTS MIGRATOIRES VERS L'EUROPE 
 
Les migrations sont un facteur central de la régulation démographique, qui change la face des continents. La « transition migratoire », si oubliée, fait partie de la "transition démographique"(modernisation des comportements: maîtrise de la mortalité et de la fécondité) ; c'est un mécanisme de respiration démographique de la planète. Lorsque les populations font face à leur période d'accroissement maximal (chute séculaire de la mortalité, avant la transition de la fécondité), l'exutoire à la pression démographique réside dans l'émigration; c'est le cas du XIX° siècle européen. Les Européens partent alors vers les Amériques, l'Afrique du Sud, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et la Sibérie: la population de ces régions passe d'une trentaine de millions à plus de 200 millions; on assiste au peuplement de la moitié vide de la planète (près d'un milliard d'hommes vivent aujourd'hui sur ces grands espaces).
Après le grand exode européen, qui dure jusqu'au lendemain de la seconde guerre mondiale, vient le temps de l'immigration. Peu à peu, l'Europe, premier continent d'émigration, devient le premier continent d'immigration. Le phénomène commence par la France, où les générations féminines nées depuis l'époque napoléonienne jusqu'à celles qui participent au baby-boom d'après-guerre, ont une fécondité inférieure au niveau de remplacement. Le pourcentage de 1% de population étrangère - qui marque le seuil d'entrée dans une ère d'immigration - est franchi dès 1851. La France a un siècle d'avance dans son processus séculaire de baisse de la fécondité: elle a aussi un siècle d'avance dans son cycle migratoire. Les autres grands pays du quart Nord-Ouest industriel de l'Europe (Allemagne, Grande-Bretagne, Benelux, Scandinavie, Autriche, Suisse) suivent le même mouvement et le seuil de 1% est atteint dans les années 1960. Viendra le tour de l'Europe méridionale dans les années 1980; dans caque cas, les courants migratoires sont à prédominance illégale (la régularisation suit). Après la chute du mur de Berlin et la dislocation du bloc soviétique, le processus s'étend, en commençant par les pays les plus proches de la sphère occidentale, plus avancés. Avec la dépopulation et l'aggravation des déséquilibres démographiques, économiques et politiques internationaux, des pays comme la Russie, la Bulgarie, ou la Roumanie reçoivent des immigrants (tout en continuant à subir un exode) en provenance de pays plus défavorisés d'Asie ou d'Afrique: on trouve toujours plus miséreux que soi. La ligne Nord-Sud, longtemps intérieure à l'Europe occidentale, s'est déplacée vers la Méditerranée; aujourd'hui, elle glisse vers la barrière saharienne et le Moyen-Orient. Le peuplement de l' Europe s' africanise, s' asiatise et s' islamise; le mouvement est inéluctable; il s' agit non de le subir, mais de la canaliser, de l' organiser, et de le maîtriser, pour en faire, en dépit des spasmes de l' intégration, un levier de co-développement.
LES CHAPITRES

Présentation de Jean Claude Chesnais 00 :01

Introduction de Jean Claude Chesnais 01 :24

Le changement dans la perception de l'immigration 06 :40

La transition migratoire 14 :12

La transformation de la composition démographique 47 :22

L'analyse économique des migrations 53 :57

Conclusion de Jean Claude Chesnais 1 :09 :38

Questions 1 :11 :24

Vidéoconférence