Mousse rose de mon enfance de Najia Abeer

29/03/2017 09:56

Mousse rose de mon enfance

de Najia Abeer

 

Dans l’ombre bleue de tes ruelles

Sommeillent mes rêves

Glissent mes pas

De Sidi Rached à Sidi Bouannaba

Sillonne mon sourire dans les méandres d’un rire

Cuivré

 

Blotti au fond d’un atelier

Enjouement d’un maillet danseur

Sur le bord d’un s’ni*

Ruisselle l’eau de fleur d’oranger.

 

Oranges amères

Roses perlières

Gouttent d’un distillateur

Rouge cuivré.

Mousse rose de mon enfance

A une gouttière cendrée

Suspendue

Lèvre rose souriante.

 

Toits rouges de désir

De soleil et d’azur, voici :

Un pan de firmament

Entre deux minarets, coincé

Sidi Lakhdar, embaumé.

 

Voilà

Un chaud rayon débrouillard,

Lézard

Cent fois centenaire, toujours étonné

Noyé, heureux, dans le nil* de tes pierres

De plaisir frissonnant

Fier.

Yeux turquoise d’un zélidj*

Du Wast ed Dar, où, dans le zigzag de son souffle

La fontaine

Chuintements

Murmures

Quiétude intime d’un hammam en fleurs

Henné à l’eau de rose sous le nacre d’un qabqab*

Dans une paume fiévreuse, l’ambre d’un s’khab.*

Yeux vermeille d’un zélidj

D’un arc-en-ciel volé

Du Wast ed Dar*

L’arôme poivré d’un café dans la cendre endormie

Brasero en quête de fraîcheur

Ebloui.

 

Femmes, faites tinter vos r’dif*

Agitez votre khalkhal*

Ce soir, nous irons compter les étoiles

De la fenêtre

Du menzeh.*

Les petites, les grandes

Les plus proches, les plus éloignées

Les filantes, les voilées

Puis, nous irons nous les partager

A égalité.

Que vos rires en cascades roulent jusqu’à la s’qifa*

Que vos velours génois étalent

Montrent l’or de vos doigts !

 

De Sidi Bouannaba à Saïda

Sillonne mon sourire dans les méandres d’un rire

Doré

Blotti au fond d’un atelier

Ballade d’une aiguille trotteuse

Brodeuse

Qattifa annabi.*

 

Sillonne mon sourire dans le creux d’un rire

En offrande argentée

Pour ce pan de mur

Mille baisers

Milles bras embrassés.

 

Du Chatt à El Bat'ha

Sillonne mon sourire dans l’éclat d’un rire

En échos

Dispersés.

 

Sillonne mon sourire dans la joie d’un rire

Aux senteurs de henné

Dans une main câline

Du haut d’un quinquet

Sourire d’une Médine

A ne jamais offenser

Oublier

 

Amis de Constantine

D’hier

D’aujourd’hui

Entendez-vous ces bruits ?

Cliquetis de chenilles

Les monstres de la nuit.

 

Pour ce pan de mur nili*

Milles baisers

Mille bras embrassés.

 

S’arrête mon sourire dans l’agonie d’un rire

Trahi.

 

Najia Abeer